Burundi: Quand et comment le Burundi serait-il doté d’une armée et d’une police réellement nationales?
La constitution de la République du Burundi de 2018 regroupe l’armée et la police dans ce qu’elle appelle ‘’ Les Corps de Défense et de Sécurité’’ ; CDS en sigle. La constitution de 2005 y ajoutait aussi le Service National des Renseignements communément appelé ‘’ documentation Nationale’’. Pourquoi le pouvoir cnddfdd a-t-il préféré mettre à part le service national des renseignements? C’est un autre sujet à traiter. On y reviendra.
Nous abordons ce sujet très intéressant et très vaste car, si aujourd’hui le Burundi connait des cycles de violences répétitives, les pouvoirs qui se sont succédés ont toujours utilisé ces corps de défense et de sécurité, et prioritairement l’armée pour se maintenir au pouvoir, défendre les intérêts d’un président, d’un parti politique au pouvoir. Or, l’armée devrait être le dernier rempart, qui devrait dire halte quand l’intérêt général du peuple, sa souveraineté, est gravement menacée par un président ou un parti au pouvoir. Certains extrémistes hutus disent que Ndadaye Melchior ne serait pas tué s’il avait une armée (comme si un président doit avoir une armée à lui) ; et les membres du cnddfdd disaient à qui voulait les entendre que personne ne peut diriger le Burundi s’il n’a pas d’armée. C’est peut-être ce qui justifie la politisation à outrance des corps de défense et de sécurité par le pouvoir cnddfdd, la mise en place , la formation et l’armement de la milice imbonerakure ainsi que l’enrôlement au sein de ces CDS des membres FDRL-Interahamwe.
Malheureusement, tout ce qui précède est contraire à la constitution de 2018 que le cnddfdd a forgé lui-même, en remplacement de celle de 2005. De l’article 246 jusqu’à l’article 266 qui parlent des CDS, tout a été littéralement violé.
Sans toutefois passer en revue tous ces articles, l’article 246 ( qui est le premier article de la constitution qui parle des CDS), en son alinea1 dit : ‘’ Les CDS sont établis conformément à la loi. En dehors de ceux-ci, il ne peut être créé ou levé aucune autre organisation armée’’. Quel burundais, soit il le président, s’il essaie d’être honnête (même si ce n’est pas de sa nature), dirait que cet article n’a pas été totalement violé dans son intégralité ?
Ici, la question que pas mal de burundais intègres et d’étrangers se posent est de savoir, comment un pouvoir qui a une armée, une police et un service de renseignements totalement politisés, qui obéissent aux ordres du parti Etat, le parti au pouvoir, puisse encore penser à organiser et armer une milice ? Comment un président de la République qui a toutes ces institutions pour sa protection songe à s’entourer des membres des FDRL-Interahamwe qui sont connus au monde entier avoir commis un génocide des tutsis en 1994 au Rwanda ?
Puisqu’on a déjà esquissé la notion de politisation des CDS, faisons un coup d’œil sur l’article 266 de la constitution. Il dit : ‘’ Les CDS sont organisés de manière à garantir l’unité en leur sein, la neutralité politique des membres ainsi que l’impartialité dans l’accomplissement de leurs missions’’. Il serait difficile au Chef d’Etat-major General lui-même, encore moins le porte-parole de l’armée d’expliquer que cet article est respecté. En coulisse, ils vous diront que le pouvoir cnddfdd n’a aucun intérêt que l’article soit respecté, sinon il ne serait pas là où il est aujourd’hui.
Neutralité politique, impartialité dans l’accomplissement des missions : voilà deux qualités que les CDS n’ont pas. Non seulement qu’ils ne peuvent pas être neutres car sont au service du parti Etat au pouvoir, les CDS arrivent au stade de se sentir ridiculisés en se trouvant devant une situation où les imbonerakure sont en train de faire leur travail, ou leur donner des ordres à exécuter s’ils veulent garder leurs postes ou tout simplement leur vie. Tout ceci parce que les ordres ne viennent pas d’une chaine de commandement hiérarchisé connu, mais de la permanence du parti cnddfdd.
Que le Chef de l’Etat soit le commandant suprême des CDS,( même s’il est issu d’un parti au pouvoir), ne signifie pas obligatoirement que les CDS, doivent obéir aux ordres des membres influents du parti au pouvoir. Ils ont un commandement connu, bien hiérarchisé à respecter. Le chef des armées devrait être quelqu’un instruit, patriote, professionnel et non un partisan d’un parti politique (plus fort qu’un partisan car il est parmi les grands décideurs au sein du parti). C’est un membre du cnddfdd en uniforme militaire. Et, il n’est pas le seul. Tous ceux qui ont combattu au sein de ce parti/mouvement rebelle, ont gardé cette connotation, jusqu’à mettre en place une organisation qui les rassemble, NONOKA.
Les CDS sont composés des membres venus de plusieurs mouvements, de toutes tendances politiques ou même des membres qui n’ont jamais appartenu à aucune formation politique. Regrouper certains sous d’autres organisations, c’est une autre manière de les diviser. Ils sont aussi divisés non seulement dans ce sens, mais aussi dans les missions à exécuter. Certains reçoivent des missions spéciales (louches et criminelles), car ils bénéficient de plus de confiance de la part des chefs par rapport aux autres. Il arrive que certains soient même tués par simple soupçon de combattre le pouvoir, uniquement parce qu’ils ne sont pas, soit de l’ethnie hutue de la majorité des gens au pouvoir, soit qu’ils sont issus de toute autre tendance politique que le cnddfdd
Normalement, une fois vêtu de l’uniforme des CDS, les partis et mouvements d’origine devraient être complètement mis de côté ; sinon la tendance est de favoriser les membres de son parti dans l’exercice de leurs missions.
Comment alors arriver à mettre en place des CDS professionnels, qui assurent la défense du territoire et la sécurité de tout le peuple et de ses biens sans distinction aucune ? Comment arriver à mettre en place des CDS qui respectent et protègent les institutions sans toutefois être les outils de ceux qui sont au pouvoir pour chercher à s’y maintenir en violant les lois en vigueur et les droits élémentaires des citoyens ?
URN HITAMWONEZA trouve que la solution à ce problème est l’unique voie pour arriver à la stabilité de notre pays et à une véritable démocratie. Tous les pouvoirs qui se sont succédés ont toujours utilisé les CDS pour arriver au pouvoir et s’y maintenir ; en aucune fois, on a vu ces CDS se lever et dire non au pouvoir qui outrepassait les lois et mettre de l’ordre au pays pour l’intérêt du citoyen lambda. Nous attendons alors la contribution d’un chacun pour montrer au pouvoir d’aujourd’hui et à ceux qui viendront la façon la plus efficace d’arriver à des CDS réellement nationaux.
Nous allons aborder ce sujet à partir de ses racines en commençant par analyser l’organisation de l’armée pendant la période coloniale et comment elle a évolué après l’indépendance, au cours des pouvoirs dits démocratiques jusqu’aujourd’hui. Vos contributions pour enrichir ce sujet sont les bienvenues.