Burundi: Pourquoi les réfugiés burundais du camp de Mahama au Rwanda devraient ils quémander auprès du président Evariste Ndayishimiye leur retour au bercail ?
Un groupe de réfugiés burundais du camp de Mahama vient d’adresser au président Ndayishimiye, en date du 26 juillet 2020, un message dont l’objet est libellé : ‘’ Pétition sur demande du rapatriement digne et légal des réfugiés burundais exilés au camp de Mahama au Rwanda’’, avec copie pour information le gouvernement du Rwanda et la HCR. Ces réfugiés supplient le Président Ndayishimiye de les rapatrier dans la dignité et la légalité.
Cette correspondance mérite des analyses profondes sur sa motivation car le président ne cesse pas de leur lancer des messages de demande de retour dans leur pays natal. A quoi sert alors cette correspondance ? Y a-t-il encore nécessité d’écrire une telle pétition ? Est-ce que celui qui rentre chez lui a besoin de demander une permission ? Le travail de rapatriement des réfugiés burundais incombe-t-il au président de la République ? Ou il y a d’autres motivations derrière ?
Dans la logique des choses, quand les réfugiés sentent le besoin de retourner chez eux, ils se font inscrire au HCR et celui-ci entre en contact avec le gouvernement d’origine juste pour préparer leur accueil. C’est le HCR, en collaboration avec le gouvernement qui les héberge, qui organisent le rapatriement des réfugiés. Mais, on constate, à travers cette missive, que le HCR et le gouvernement du Rwanda n’ont eu qu’une copie pour information ; ce qui laisse penser à une certaine manipulation politique.
En effet, les réfugiés burundais sont de plusieurs catégories : certains ont fui la pauvreté, ils ont profité d’une insécurité qui régnait au pays pour aller chercher l’herbe verte ailleurs. D’autres ont fui par peur. Ils entendaient les autres fuir ou des rumeurs propagées par l’entourage et ont suivi le mouvement des autres. D’autres encore ont fui le pays qui était en insécurité, qui ne permettait pas que leurs affaires marchent normalement. Ils sont allés dans les pays où ils trouvent plus de sécurité et un environnement favorable pour faire bien marcher leurs affaires. Avec le degré de criminalité grandissante, accompagnée des règlements de compte, il y en a qui ont fui des mésententes avec soit le gouvernement, soit avec individus proches du pouvoir qui leur proféraient des menaces de tout genre. Il y en a qui ont fui après des tortures, des viols, d’autres ont échappé à la mort ; le pouvoir continue à les rechercher. Il y en a d’autres qui ont fui le 3eme mandat de feu président Pierre Nkurunziza. Une autre catégorie, la plus dangereuse, n’ont pas fui, mais sont partis dans une mission du pouvoir cnddfdd. Ils se sont faits réfugiés et ont vécu avec eux, juste pour suivre tout ce qui se fait en exil et renseigner. Cette catégorie de réfugiés déguisés en espions est très fréquente en Tanzanie, mais ils se retrouvent aussi en Rd Congo, en Uganda et au Rwanda.
Tous ces groupes n’ont pas fui la même chose et pas dans les mêmes conditions. Pourtant, le HCR et le Gouvernement d’accueil les considèrent tous comme des réfugiés au même niveau.
Aujourd’hui, il est temps que chaque réfugié fasse un examen de conscience pour voir si ce qu’il a fui n’est plus là avant de décider de rentrer. Ceux qui ont fui le 3eme mandat devraient être déjà au pays car le problème n’est plus d’actualité. Ceux qui sont partis pour le business, ceux qui fui la pauvreté, la peur, les rumeurs, des mésententes quelconques, sont probablement ceux-là qui sont entrain de négocier avec le gouvernement de Ndayishimiye leur retour au bercail. Sans doute que la correspondance adressée au président est pour lui demander de se préparer à régler leurs ‘’ petits problèmes’’ pour qu’ils rentrent. Ceux qui ont été envoyés se faire réfugiés alors qu’ils sont sur une mission de ce gouvernement, les uns vont rentrer avec ce premier groupe (c’est fort possible que ce sont eux qui sont entrain de mobiliser et organiser ce retour en désordre), les autres vont probablement rester avec ceux qui ne rentreront pas afin de continuer leur mission.
Les informations à notre disposition nous disent que la majorité de ceux qui se sont faits inscrire sur le liste en annexe à la pétition sont originaires des provinces frontalières avec le Rwanda ( Kirundo-Muyinga). La majorité parmi eux seraient fui à cause de la faim. Eux et d’autres seraient aujourd’hui manipulés par certains politiciens originaires de ces provinces. Ces derniers sont aussi en pourparlers avec le pouvoir de Gitega pour leur retour au pays et ils chercheraient à satisfaire l’exigence du pouvoir consistant à mobiliser les réfugiés pour qu’ils rentrent en masse.
Jusqu’à la fin du mois de juin 2020, les chiffres donnés par le HCR montrent que plus de 430.000 burundais sont encore réfugiés dans beaucoup de pays : 164873 sont en Tanzanie, 103690 en Rdcongo, 72007 au Rwanda, 48275 en Uganda, 13800 au Kenya, 7800 au Mozambique, 8300 au Malawi, 9200 en Afrique du Sud, 6000 en Zambie.
URN HITAMWONEZA estime que c’est un droit le plus absolu des réfugiés de rentrer volontairement dans leurs pays d’origine. Il suffit qu’ils jugent eux-mêmes que leur sécurité est garantie. Ils n’ont pas alors besoins de quémander leur droit. La voie officielle est de passer par le HCR et le gouvernement d’hébergement et ainsi avertir le pays natal (qui doit les accueillir). Une telle pétition montre plutôt une certaine manipulation ou des liens cachés longtemps entretenus avec le gouvernement du pays d’origine (voir les différentes catégories de réfugiés citées ci haut). Notre hypothèse est justifiée par le fait que c’est le porte-parole de la sécurité publique (l’homme impliqué dans toutes les affaires de montages du gouvernement) qui n’a pas tardé à répondre à leur correspondance (VOA du 03 Aout 2020). Pourtant la correspondance avait été adressée au président de la République. Il semble accuser le gouvernement qui les héberge de les retenir(le pays que ce gouvernement de Gitega a toujours traité d’ennemi). C’est peut-être ce qui justifie que ces réfugiés se soient adressés au président de la République plutôt qu’au HCR et le gouvernement Rwandais. Ce qui montre une certaine complicité entre ce groupe de réfugiés et le gouvernement de Gitega dans cette affaire.
S’il est du droit des réfugiés de rentrer quand ils sentent le besoin, il est aussi du droit de rester dans les pays qui les hébergent quand ils ne se sentent pas encore en sécurité dans leur pays d’origine ; quand ils estiment que ce qu’ils ont fui est toujours sur place. Le HCR devraient veiller au respect des lois internationales en matière des réfugiés : éviter un rapatriement forcé, respect des 150km entre le lieu d’installation du camp et la frontière du pays d’origine, si le pays d’accueil ne veut plus des réfugiés sur son territoire, leur chercher un autre pays d’accueil. Un pays qui passe outre ces lois devrait être traduit en justice devant des juridictions compétentes.