Burundi: La Belgique a une grande responsabilité historique dans les tueries et génocides dans la région des grands lacs (Troisième partie).

Burundi et Belgique

Burundi: La Belgique a une grande responsabilité historique dans les tueries et génocides dans la région des grands lacs (Troisième partie).
Nous l’avons dit et nous ne cesserons jamais de le répéter. L’origine de la haine des hutus envers les tutsis vient de la colonisation belge qui a bouleversé l’ordre existant pour implanter une administration qui leur soit favorable. Mais surtout, ces phrases contenues dans les rapports administratifs des agents belges tel celui de J.M Detscheid, Administrateur Territorial à Bururi en 1929, qui affirme : « Il est certain que les Batutsi sont plus intelligents, également indifférents, plus brutaux et plus énergiques que les Bahutu ; leur autorité vient beaucoup de ces qualités et même de ces défauts…Placer un Muhutu ‘’intelligent’’ à la tête d’une chefferie est toujours risqué d’avance. ». Pierre Ryckmans, Résident de l’Urundi renchérit : « Les Batutsi étaient destinés à régner, leur prestance leur assure déjà, sur les races inférieures qui les entourent, un prestige considérable ; leurs qualités et même leurs défauts les rehaussent encore (…). Ils sont d’une extrême finesse, jugent les gens avec une infaillible sûreté, se meuvent dans l’intrigue comme dans leur élément naturel. Fiers avec cela, distants, maîtres d’eux-mêmes, se laissant rarement aveuglés par la colère, écartant toute familiarité, insensible à la pitié et d’une conscience que les scrupules ne tourmentent jamais. Rien d’étonnant que les braves Bahutu, moins malins, plus simples, se soient laissés asservir sans esquisser un geste de révolte. »
Ce n’était pas par amour que les belges ont dit cela, loin de là. C’était une manière de dresser les uns envers les autres pour que, de cette mésentente, ils trouvent des facilités de les gouverner car ils savaient d’avance qu’avec l’organisation qu’ils ont trouvé sur place, s’ils restaient unis, il n’y avait pas moyen d’y rester pour longtemps.
Le régime de tutelle s’est donc implanté. Les historiens nous disent qu’après la deuxième guerre mondiale, la Société des Nations a été remplacée par l’Organisation des Nations-Unies dont l’existence commença officiellement en 1946. L’administration du Ruanda-Urundi fut confiée à la Belgique par l’Assemblée Générale des Nations Unies le 13 décembre 1946. La Belgique avait la mission de “favoriser le progrès politique, économique et social des populations ainsi que le développement de leur instruction, favoriser également leur évolution progressive vers la capacité de s’administrer eux-mêmes”. Les Nations-Unies organiseront des missions de visite pour se rendre compte de l’état d’exécution des recommandations de l’ONU de favoriser le progrès politique, économique et social. C’est dans ce contexte que le pouvoir tutélaire promulgua le décret du 14 juillet 1952 qui élargit les attributions de l’administration indigène notamment, en étendant les pouvoirs des Bamis qui avaient dans leur compétence un certain nombre de matières réservées à l’administration belge. Des transformations économiques et sociales ont été tout de même réalisées.
En rapport avec l’agriculture, le pouvoir colonial a aidé à lutter contre l’érosion, à augmenter la production, notamment avec le système d’irrigation, l’utilisation des engrais, en sélectionnant les cultures suivant les régions. Ils ont aussi introduit les cultures commerciales telles que le café, le coton et l’huile de palme. Dans l’élevage, en vue d’accroître la productivité, le pouvoir colonial introduisit de nouvelles races dans des fermes comme celle de la Ruvyironza installée à Mahwa depuis 1954. La race Sahiwal du Pakistan pour la viande et Jersey (de l’ile de Jersey) pour le lait. La Belgique aidera dans la construction des étables, l’introduction du service vétérinaire pour vaccination contre peste bovine. Malgré ces efforts, les deux secteurs ont gardé un cachet traditionnel car ces changements ont été introduits de façon brutale sans consultation de la population. Dans le domaine des transports et communication, les belges ont forcé les gens à tracer des routes, ce qui fut très pénible à la population avec le phénomène de chicote. La première route construite reliait Usumbura à Astrida (dans l’actuelle préfecture de Butare au Rwanda). En 1960, les tronçons (Bujumbura-Astrida) , (Bujumbura-Bukavu) et (Bujumbura-Gitega)étaient asphaltés de même que les rues principales de Shyangugu, Burare, Kigali. Pour les voies navigables, les lacs Tanganyika et Kivu servaient de support à la navigation qui était entre les mains de la Compagnie des Chemins de Fer du Congo Supérieur et des Grands Lacs. Le transport aérien était favorisé par la position géographique de la ville de d’Usumbura. En 1937, le premier avion en provenance directe de Belgique atterrissait à Usumbura. En 1960, l’aéroport d’Usumbura fut construit à Gakumbu et servait de plaque tournante aux vols en direction de Tchad, du Soudan, du Nigéria, de l’Egypte, de la Grèce et de la Belgique. Il était capable de recevoir des avions de type D.C. 4 et D.C.6. Les compagnies aériennes Sabena et Sobelair assuraient divers services aériens entre le Ruanda et l’Urundi.
Les secteurs de commerce, mines et industries n’ont pas connus de grands développements. Au départ, le commerce était basé sur l’échange, puis les arabes, les indiens et les pakistanais se sont implantés sur quelques centres et ont introduit l’usage de la monnaie. Le développement industriel était lié à l’énergie. Les principales productions minières étaient le Wolfram, l’or, la cassitérite et le Bastnaésite. Au terme de la colonisation, quelques industries légères existaient à Usumbura. C’est le cas de la Brasserie, les usines de traitement du café et du coton, l’industrie textile (SIRUCO, LOVINCO) et quelques industries chimiques.
Sur le plan social, les belges ont combattu la religion traditionnelle et introduit le catholicisme. Ils ont d’abord converti les chefs pour que la masse suive automatiquement. Le système éducatif dans l’Afrique Belge était conçu pour répondre aux réalités du moment, c’est-à-dire l’exploitation des colonies au profit de la métropole. La politique scolaire insistait sur trois objectifs fondamentaux : dispenser l’instruction et l’éducation à la totalité de la jeunesse ; dispenser un enseignement qui prépare les autochtones à vivre dans leur milieu et dispenser un enseignement préparant l’élite
Dans le domaine médical, l’administration coloniale s’est surtout engagée dans la lutte contre les épidémies, la mortalité infantile et d’autres maladies en mettant en place un dispositif sanitaire important
Nous venons de passer en revue quelques domaines où la colonisation belge a introduit des changements visibles, mais tout cela en visant leurs propres intérêts. Nous parlerons demain du début des partis politiques et la recherche de l’indépendance et nous tenterons de mettre en peu de lumière sur l’implication de la Belgique dans l’assassinat du prince Louis Rwagasore.
URN HITAMWONEZA reconnait que la colonisation belge a fait des efforts dans le développement de certains domaines comme relevés ci haut, mais elle garde la responsabilité d’avoir semé des divisions au sein des composantes de la société burundaise ; la Belgique n’a pas non plus les mains propres dans les évènements macabres qui ont suivi l’indépendance du pays.

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